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Syrie : Liberté pour Palmyre !

30/03/2016 – 18h50 Syrie (Lengadoc Info) – Point de situation numéro 6 – Nous annoncions précédemment avec ironie qu’il ne serait pas « improbable que le drapeau du Hezbollah flotte bientôt sur Raqqah, la capitale jihadiste ». Nous nous étions légèrement trompés puisque c’est sur la cité antique de Palmyre que les drapeaux des forces gouvernementales flottent désormais.

Cette victoire est avant tout symbolique et renforce à la fois la Russie mais également le président en titre Bachar El-Assad. En effet, ce dernier redevient un acteur fréquentable pour de plus en plus de personnalités puisque son action militaire se tourne contre le « meilleur ennemi » du monde dit civilisé. Son départ de la tête de la Syrie n’apparait plus désormais comme une priorité pour nombre d’acteurs internationaux. C’est un important coup dur pour les forces rebelles qui doivent regretter cette trêve arrachée de haute lutte…

Au niveau symbolique c’est un peu la victoire de la civilisation contre la barbarie; formulation manichéenne qui se justifie par le fait que la folie et l’intolérance islamistes ont trouvé à Palmyre un décor de choix dans lequel s’exercer. L’Etat Islamique s’était emparé, il y a un an, de la cité classée au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1980 pour ses vestiges romains remarquablement conservés. La cité, vieille de 2000 ans, était surnommée « la perle du désert syrien ». Les fous d’Allah ont eu pour priorité de détruire toutes ces références non islamiquement-correctes.

Rappelons quelques événements qui s’y sont déroulés :

1/ Dynamitage de sites architecturaux majestueux tels que le temple de Bel, le temple du dieu solaire syrien Baalshamin, l’Arc de Triomphe (qui n’avait rien de religieux), le lion d’Athéna, des tours funéraires…

2/ Destruction de toutes les statues anthropomorphes ou zoomorphes situées dans la ville ainsi que dans les musées. Conformément aux préceptes du wahhabisme.

3/ Décapitation en place publique de l’ancien directeur général des Antiquités Khaled Assaad agé de 82 ans, qui supervisa la restauration de la cité de Palmyre pendant cinquante ans. Ce dernier avait tenu à rester sur place malgré l’avancée des combattants islamistes. Une attitude pleine de courage pour cet homme qui avait consacré sa vie à la préservation d’un patrimoine mondial.

4/ Exécution à l’intérieur du théâtre antique de la ville de 25 soldats loyalistes par des adolescents embrigadés. Ce théâtre sera heureusement préservé mais l’Etat Islamique, avec les talents de communication dont il s’est fait une spécialité, n’a pas manqué de diffuser les vidéos de ces meurtres mis en scène et devant des spectateurs.

Selon le chef actuel des Antiquités syriennes Mamoun Abdelkarim, les destructions causées à la cité par l’Etat Islamique, ainsi que lors des combats ayant permis la libération de la ville, ne sont pas une fatalité. Il se veut rassurant en affirmant que « le paysage général est en bon état » et annonce une remise en état à l’identique dans les 5 ans. Un grand soulagement également pour Irina Bokova la directrice générale de l’Unesco qui affirmait, en élargissant son analyse, que « depuis un an, le saccage de Palmyre est le symbole du nettoyage culturel qui sévit au Moyen-Orient ».

La libération de Palmyre constitue malgré tout une avancée stratégique importante puisque la carte des combats a été modifiée en profondeur depuis l’entrée en vigueur du cessez le feu. En effet, puisque les combats ont « pratiquement » cessé dans la partie Ouest de la Syrie, c’est vers l’Est que se situe le nouveau front, territoire sous la coupe des combattants de l’Etat Islamique. Et Palmyre est un des points d’entrée dans ce territoire. Après Palmyre en direction du Nord-Est se trouve la base militaire et la ville de Deir Ez-Zor encerclées depuis quatre ans et qui subissent les assauts répétés de l’Etat Islamique. On se souvient de la libération de la base aérienne de Qweires ainsi que de la poche d’Al-Zahra il y a quelques semaines. Le secours des enclaves semblant être un des objectifs de Bachar El-Assad, on imagine l’attente des personnes enfermées à Deir Ez-Zor et l’espoir d’une possible libération.

Le bilan des combats a été lourd pour tous les belligérants avec 400 morts du côté jihadiste pour 180 du côté loyaliste. Les forces gouvernementales dans leur ensemble avaient tenu à participer à ce combat et ce sont des unités hétéroclites qui ont pu œuvrer en parfaite coordination pour chasser les combattants de Daech. Les forces au sol ont été appuyées par d’importants tirs d’artillerie ainsi que par un soutien aérien russe à l’aide de bombardiers et d’hélicoptères de combat. Des forces spéciales russes ainsi que des « coordinateurs d’opération » étaient présents au coté des soldats chiites libanais, iraniens et syriens. Au terme de cette bataille, nous pouvons affirmer qu’elle constitue le premier vrai revers militaire de Daech depuis les révoltes anti-Assad d’il y a cinq ans.

La libération de Palmyre est une importante victoire et seules des personnes de mauvaise foi objecteront qu’elle contribue à redorer le blason du président de la Syrie Bachar El-Assad et de son homologue russe Vladimir Poutine. Il faut malgré tout garder en tête que les forces de l’Etat Islamique présentes à Palmyre, si elles ont subi de lourdes pertes, n’ont pas été anéanties mais ont effectué une retraite face au déchainement de fer et de feu. Vers où se dirigent-elles? Quel sera leur prochain objectif? La pression exercée sur Deir Ez-Zor par les forces islamistes depuis une dizaine de jours peut être un signe révélateur de la volonté de Daech d’enlever cet ilot de résistance et de montrer que malgré les revers subis, il possède encore un potentiel de nuisance non négligeable.

Martial Roudier

Photos : DR

Lengadoc-info.com, 2016, dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine.

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