02/06/2021 – 11h00 Montpellier (Lengadoc Info) – Le 22 mars n’est pas une date anodine dans l’histoire estudiantine en France. Ce jour est resté comme étant le commencement de la révolte étudiante dite de « Mai 68 » lorsque des étudiants de la faculté de Nanterre menés, entre autres, par Daniel Cohn-Bendit, lancent le « Mouvement du 22 mars ».
Aussi, lorsque cinquante ans plus tard, jour pour jour, des militants et syndicalistes d’extrême gauche tentent d’occuper la faculté de droit de Montpellier, le parallèle est immédiat. D’autant plus que, comme l’aiment à répéter ces militants, cette fac, réputée « de droite », n’a pas été occupée depuis mai 68 ! C’est donc bien tout un symbole pour les occupants dont la très grande majorité viennent de la faculté de Lettres à la réputation totalement opposée sur le plan politique.
Mais ce « symbole » est-il réellement fondé ? La faculté de droit de Montpellier a-t-elle bien été « occupée » en 1968 ?
La fac de droit de Montpellier a-t-elle vraiment été occupée en mai 68 ?
Professeur d’histoire-géographie et engagé à gauche (actuellement adjoint au maire socialiste de Marseille), Pierre-Marie Ganozzi a travaillé sur le déroulement des événements de mai 68 à Montpellier. Il explique que les facultés de la ville n’ont pas été bloquées même si certaines comme la fac de lettres connaissent une véritable occupation. En réalité, le 13 mai 1968, alors qu’a lieu l’une des plus importantes manifestations qu’a connue la ville jusqu’à présent, « les cours sont assurés presque normalement dans les facultés de Droit, Médecine et Pharmacie ».
De son côté, le sociologue Michel Crespy raconte que « pendant les événements de mai 68, les deux seuls profs d’économie plutôt marqués à gauche de la fac de droit sont venus enseigner à Paul-Valéry : ils ne se sentaient plus vraiment les bienvenus chez eux…»
Des étudiants témoignent
Même son de cloche du côté de l’ancien doyen Paul Alliès. Étudiant à la fac de droit en 1968, il est alors membre des Jeunesses Communistes Révolutionnaires. Lors d’une interview à France Bleu en 2018, il témoigne :
« En 68, la fac de droit de Montpellier était très en retard par rapport à l’ensemble du mouvement étudiant. La corpo de droit, qui était clairement à droite, nous empêchait de nous exprimer. On était pourchassés à coups de parapluie. C’était quand même pas le bonheur ! ». Le journaliste ajoute alors que « quand les premières manifestations éclatent à Paris, Paul Alliès déserte les amphis de sa fac pour investir les pelouses toutes neuves de Paul Valéry ».
Également étudiant à la fac de droit de Montpellier en mai 68, Richard Roudier (Ligue du Midi) milite, lui, à l’opposé du spectre politique puisqu’il est encarté à la Fédération des Étudiants Nationalistes, l’un des deux mouvements nationalistes présents alors à Montpellier avec Occident (dont le leader local est alors Jacques Bompard, actuel maire d’Orange). Interrogé par Lengadoc Info, lui aussi confirme l’absence des activistes d’extrême gauche au sein de l’université : « je ne me souviens plus exactement de la date, mais autour du 20 mai j’avais organisé un rassemblement devant la faculté. Nous étions près de 300 personnes et nous n’avons pas vu un seul gauchiste. S’ils avaient été là, nous les aurions chassés ». Dans son livre « Le glaive et la charrue », Richard Roudier raconte même quelques « excursions » à Paul Valéry.
Photos : DR
Lengadoc-info.com, 2020, dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine.